La Guède ou Pastel des teinturiers (Isatis tinctoria) -la Waide en Picardie, qui a donné le fameux « bleu d'Amiens »- est une plante bisanuelle, une crucifère à fleurs jaunes qui ressemble au colza.
Si la Guède est une pante médicinale réputée pour son action anti-infectieuse et cicatrisante, c'est surtout une plante tinctoriale, véritable or bleu qui pendant des siècles a assuré la propérité de régions entières, essentiellement le midi toulousain et la Picardie.
Ses feuilles récoltées et partiellement séchées étaient broyées pour donner une pâte qui subissait une première fermentation et dont on formait à la main des boules d'environ 15 cm de diamètre (de 300 à 500 gr) appelées pelotes, ou coques dans la région toulousaine qui pour cette raison pris le nom de pays de Cocagne.
Ces coques étaient mises à sécher sur des mâts (mâts de cocagne), hors de portée des voleurs, pour ensuite être stockées, ou réduites en poudre et conditionnées pour l’exportation. Plus tard, on les écrasait et on les mouillait pour déclencher une deuxième fermentation. La pâte granuleuse obtenue alors s'appelait l'agranat et servait de base aux teintures.
À ce stade, un an s'était écoulé depuis la récolte des feuilles, et durant toutes les opérations on avait le souci constant d'éviter le moisissement.
C'est l'oxydation à l'air du jus extrait de la pâte fermentée qui permettait d'obtenir le célèbre et exceptionnel bleu pastel, de grande tenue à l'eau ou au soleil .
Après mélange avec d'autres plantes tinctoriales, on obtenait des couleurs vertes, pourpres ou violettes.
La culture du pastel pratiquée depuis le XIV°siècle commença à décliner à partir du XVIII° siècle. Concurrencé par l'indigo et bien plus tard par les pigments synthétiques, il finit par disparaître complètement.
Il y a quelques années sa fabrication a été reprise, dans le
Gers pour le bleu de cocagne et dans la Somme pour la Waide ou Guesde.
L'indigotier (Indigofera tinctoria) quant à lui est une plante à fleurs roses des régions chaudes, et qui fait partie de la famille des fabacées ou légumineuses.
Il en existe de nombreuses variétés, mais aucune ne pousse en Europe. Son principe colorant se trouve dans les feuilles les plus hautes et les plus jeunes.
La teinture à l'indigo est connue depuis le néolithique dans les régions où pousse l'arbuste, en Asie et en Afrique. On retrouve par exemple au Soudan, dans l'île de Ceylan ou en Insulinde, des vêtements teints de ce bleu particulier. Très tôt l'indigo est surtout utilisé comme produit d'exportation, à destination du Proche-Orient, mais étant d'un prix élevé il n'est utilisé que pour teindre les étoffes de qualité.
En Europe il a été apprécié beaucoup plus tardivement, le bleu n'y ayant une symbolique forte qu'à partir du XIIème siècle, après l'Antiquité romaine et le haut Moyen-Age.
Le principe colorant s'appelle l'indigotine, tout comme pour la guède, mais il est bien plus puissant.
Au Japon, l'indigo est très présent dans les ouvrages textiles, dans la tradition populaire autant que pour un usage plus aristocratique.
Les Komebukuro (de Kome = riz, et Fukuro = sac) sont des sacs de toile, en coton ou en ramie, qui étaient utilisés pour apporter du riz, soit comme cadeau à une personne de valeur, soit en offrande dans les temples bouddhistes lors des festivals.
et des pièces textiles sont tirées
du magnifique site anglais Šri threads
Parfois constitués de plus de trente pièces de textiles -précieuses chutes récupérées sur des vêtements usuels- ils proviennent du Japon rural, ceux-ci plus particulièrement d'une région située au nord-ouest de Honshu, le territoire montagneux et enneigé de Niigata.
Les morceaux ont été soigneusement sélectionnées pour constituer un ensemble harmonieux. Assemblés à la main avec minutie, ils ont été quiltés de même pour maintenir les épaisseurs en place.
6 commentaires:
Ouhooohoooh ...
Que j'aime ce billet !
( d'où mon hululement ... )
Et la phytolaque ??
Jolie plante ... Jolies couleurs !
Et deux nouvelles recrues pour le défi papier !
Oups', pour les reccrues j'en ai déjà à oublié deux... ça ferait quatre ?
Pour la (ou le) guède, on est loin des coulers MCI... mais ça fait tellement du bien, n'est-ce pas !?
(Je retourne à mon 3ème bain, quel traquenard !)
Les petits pochons à riz me font craquer.
Je pense qu'il y a un brave artisan qui a repris la fabrication de ce bleu si précieux.
Vous avez aussi en France, vos carrières d'ocre qui sont exceptionnelles!
Merci pour ce billet fort intéressant.
A bientôt!
Tu as tout à fait raion Mam'zelle Angèle, la fabrication n'est pas abandonnée, d'ailleurs j'ai rectifié !
Merci de ta visite.
A Lectoure, dans le Gers, la cocagne a repris vie... Ici, dans le Vaucluse, il est possible de se procurer l'indigo du polygonum et de la guède aussi...
Des articles toujours aussi précieux !
Quelle merveilleux cours!!!
Je savais que les pigments de bleu étaient plus difficile à obtenir, mais de là à imaginer toute "l'épopée" pour y arriver!!!
Merci:)
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