Ce petit film tourné en 1910 montre une mouche en pleine activité sportive, véritable derviche tourneur miniature, jonglant frénétiquement avec des haltères, des petits morceaux de bois ou de liège, des brindilles et des boules de coton ou de crin, et jouant à l'équilibriste avec une autre mouche.
À la fin, elle s'assoit sur une très petite chaise pour parachever ses exercices.
D'un bout à l'autre on est littéralement ahuri par les prouesses de l'athlète minuscule, partagé entre rire et étonnement, à se demander dans une sorte d'ébahissement si l'insecte a été dressé ou s'il s'agit d'une série de très habiles trucages.
Il est fort possible que la mouche ait été collée à l'aide de glue pour arriver à un tel résultat, bien que Percy Smith -le réalisateur de ce petit chef d'oeuvre et pionnier du genre- ait affirmé en son temps qu'il n'avait jamais eu à faire souffrir aucune créature pour arriver au bout de ses expériences cinématographiques.
Frank Percy Smith, né à Londres en 1880, rêvait d'exploiter les vertus pédagogiques du cinéma, mais son emploi au Conseil de l'Education lui en offrait peu l'occasion. C'est ainsi que, pour démarrer sa carrière de cinéaste, il choisi de travailler pour le réalisateur Charles Urban, qui avait été très impressionné par une de ses photographies présentant en gros plan la langue d'une grosse mouche bleue.
Pendant la Première Guerre mondiale, Smith fit une série de films montrant des batailles à travers des cartes animées et travailla comme photographe de la Marine. Lorsque la guerre fut finie, il se tourna vers la comédie, notamment avec «The Bedtime Stories of Archie the Ant» (Histoire du coucher d'Archie la fourmi) réalisé en 1925, mettant en vedette des personnages d'insectes dans un environnement naturel.
Mais sa véritable passion fut «Secrets of Nature» (secrets de la Nature), une série réalisée pour British Instructional Films. Démarrée en 1922, cette série se poursuivi dans les années 30 sous le nom de «Secrets of Life» (Secrets de la vie), et prospéra jusqu'à sa mort en 1945.
Les changements technologiques tels que la sonorisation des films lui furent faciles à intégrer -les commentaires étaient extrêmement travaillés ainsi que les paroles ou les inter-titres- et ses films fascinèrent plusieurs générations de spectateurs, au même titre que les documentaires sur la faune de David Attenborough sur la BBC, l'équivalent de Frédéric Rossif pour l'ORTF.
Percy Smith fut un véritable pionnier, inventant des méthodes originales -et parfois bizarres-, aussi bien pour réaliser des gros plans sur des choses minuscules que pour filmer en Time Lapse Photography (technique qui consiste à filmer sur un temps très long quelque chose qui évolue très lentement, pour ensuite passer les images en accéléré), impliquant tous les types de dispositifs faits maison, y compris de régler un ensemble de systèmes d'alarmes dans sa propre maison afin de pouvoir être réveillé au beau milieu de la nuit si une bobine nécessitait un changement inopiné.
Doué d'une patience infinie, il pouvait passer jusqu'à deux ans et demi pour terminer un film.
Il avait également une dimension très populaire, avec l'heureux talent -comme il le disait lui-même- d'être en mesure de nourrir son audience «d'un soupçon d'enseignement dans un océan de divertissement».
Les techniques modernes du cinéma peuvent difficilement améliorer les résultats obtenus par Smith dans les premières décennies du 20ème siècle. Quant au chef-d'oeuvre qui signe ses débuts, «Naissance d'une Fleur» réalisé en 1910, il n'a jamais quitté les circuits de ditribution.
Dans les années 30, Smith tendra à s'appuyer sur ses collaborateurs, Mary Field et HR Hewer, jusqu'à leur faire diriger ses productions, ce afin de se consacrer à un laborieux travail de photographie.
Il s'est éteint dans sa maison de Southgate, au nord de Londres, le 24 Mars 1945.
3 commentaires:
Merci pour ce petit film insolite et décalé, tout à fait représentatif des trésors que tu partages avec nous.
j'ai l'impression de voir un clou sur l'aile de la mouche, je ne suis pas certaine que ce soit fait dans le respect de l'animal.
mais je peus me tromper les ailes des mouches sont tres fines et donc le clou est peu-etre simplement en transparence (ce que j'espere)
Oh làlà, oui en effet... !
Mais peut-être que le clou est juste entre les deux ailes, sans en percer l'une ou l'autre !?
Diable, quelle histoire !
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