Créations de papier découpé, formé, déformé, façonné,
assemblé, coupé, gauffré, encollé, plié,
plissé, retordu, cousu, signé...
Objets rêvés, merveilleuses extrapolations de Violise Lunne,
créatrice danoise.
Belles à regarder, merveilleusement touchantes,
oeuvres éphémères à la façon des objets inanimés d' Ellwand, trop fragiles pour être portées, mais se laisser ravir par elles...
Une autre forme de rêve après les envolées couturières
de Manon Gignoux.L'apparition du papier dans les garde-robes remonte aux années soixante.
En 1966, la firme américiane
Scott Paper Compagnie invente un modèle de robe en papier qui n'était destinée qu'à être un objet publicitaire, un instrument de marketing. Pour un dollar, les femmes pouvaient l'acheter et recevoir des coupons pour les produits papetiers de la firme en question.
La robe, plutôt difforme et sans attrait, n'était pas une invention destinée à être prise au sérieux mais, à sa grande surprise, la compagnie reçu en moins d'un an un demi-million de commandes pour ce modèle.
Comment s'en étonner à une époque où les assiettes et les couverts jetables venaient de faire leur apparition ! Les gens cherchaient la facilité et le confort immédiat.
Après les années de privation dues à la guerre et celles d'après-guerre où l'économie reprenait péniblement son essor, la société industrielle s'était engouffrée dans une économie de marché insufflée à coup de plan Marshall par les états-Unis, peu de gens doutaient alors de la durabilité des ressources de la planète et l'origine de la pâte à papier n'inquiétait pas grand monde.
En France on avait de Gaulle, Barthes venait d'écrire
Mythologie, c'était l'époque de la DS et celle du fordisme venu d'Outre-Atlantique, celle des beatniks et de Kennedy, l'époque d'une envie de vie facile. La vitesse avait été inventée depuis belle lurette, aux riches heures de la révolution industrielle. On en était à inventer l'accélération, c'était l'avènement du design et de l'aérodynamisme.
Produire et consommer, avec l'invention du développement l'urgence était de mise !
Comment ne pas succomber alors à cette mode originale et sans soucis, puisqu'un ourlet se réglait d'un simple coup de ciseaux, et qu'il suffisait de jeter son vêtement lorsqu'il était sali !
Devant un tel engouement, les agences de mode se lancèrent dans l'aventure en faisant des expériences tant au niveau du style que de la matière première, en ajoutant d'autres matériaux au papier pour obtenir un vêtement plus robuste qui pourrait même être lavé.

La
Mars Manufacturing Company fabriqua et diffusa une large gamme qui allait de la simple robe basique à l'élégante tenue de soirée en passant par les tenues de mariage, elle proposait par exemple une traîne de mariée entièrement faite de papier, et rien ne dépassait les 20 dollars.
On inventa tout ce qui était possible, pantoufles en papier, costumes en papier, imperméables et bikinis en papier waterproof, dans la foulée on inventa même une robe sur laquelle poussait de l'herbe lorsqu'on y ajoutait de l'eau. Certaines robes étaient vendues prêtes à être décorées par le consommateur. Andy Warhol lui même succomba quelque peu à cette mode en créant une robe imprimée à partir de ses sérigraphies Campbell.

Alors qu'actuellement nous prenons à l'inverse conscience des limites des ressources que la terre nous offre, certains artistes se sont emparés du principe papier dans un mouvement ascendant, à savoir de ce qui se jette à ce qui produit, témoin ces sublimes créations faites de matières au rebut, vénération ou réhabilitation de matières "secondaires", sorte d'art brut ou d'Arte Povera.

Robe en feuilles d’annuaires téléphoniques
de la créatrice Jolis Paons,
"plissées, collées, entièrement cousues à la main"...
Robe en papier à cigaretteA l’heure de la rigueur économique et de la protection de l'environnement, voilà un moyen efficace d'entamer avec panache une décroissance conviviale, digne et sans effet de privation...
Une sorte de jeu, à la manière des paper-dolls de notre enfance, en version beaucoup plus évoluée.
Mais gare aux pieds dans le tapis, et surtout aux enfants qui aiment dessiner sur les murs et découper les rideaux du salon, ils risqueraient de prendre de tels vêtements pour un terrain de jeu... Qui pourrait le leur reprocher !